CONJONCTURE
Le secteur de l'agroéquipement en proie à d'inquiétantes pénuries
Depuis le début de l'année, une crise de l'approvisionnement s'installe durablement dans l'industrie en général et le secteur de l'agroéquipement en particulier. Retards de livraison, marché bloqué, les professionnels s'inquiètent aujourd'hui d'une crise dont l'issue n'est toujours pas connue.
Selon un tout dernier sondage effectué par le syndicat français des industriels de l'Agroéquipement, Axema, auprès de ses adhérents, l'incertitude sur le marché des matières premières industrielles s’aggrave : 94 % des entreprises rencontrent aujourd'hui des difficultés d’approvisionnement et 75 % d’entre elles sont confrontées à une pénurie d’approvisionnement. Elle concerne notamment les composants électroniques, le matériel hydraulique et surtout l'acier. Ce dernier, qui représente à lui seul 30 à 40 % du coût de fabrication moyen du matériel agricole, a plus que doublé en un an. Son prix s'élevait en avril 2020 à 550 € la tonne, il s'affiche désormais à 1 250 € la tonne et devrait continuer à prendre de la valeur dans les prochains mois, d'après les professionnels du secteur. Une situation tendue qui se traduit par un autre chiffre : 13 % des industriels de l'agroéquipement estiment aujourd'hui inéluctable l’arrêt temporaire de certaines de leurs chaînes de production.
Une situation tendue dans les usines
« Depuis près d'un an, la demande est forte et les ventes sont soutenues. On constate aujourd'hui que les usines de production font face à des commandes qui vont au-delà de leurs capacités de production. La pénurie de matière première que nous vivons depuis le début d'année aggrave encore les risques de retards », explique Jean-Marc Bosson, président du Sedima Rhône-Alpes, organisation professionnelle qui fédère les entreprises de service, de distribution et de location du machinisme agricole, des espaces verts et des métiers spécialisés, et qui se situent juste après les industriels dans la chaine de l'agroéquipement.
Conséquence immédiate pour les agriculteurs : des délais d'attente plus longs après commande, qui s'échelonnent en moyenne de deux à quatre mois. Pour les professionnels de l'agroéquipement, la reprise se fait par conséquent plus tard, sur du matériel plus usagé puisqu'il continue d'être utilisé par les agriculteurs en attendant la livraison de leur commande. Pour Jean-Marc Bosson, également dirigeant des établissements éponymes en Haute-Savoie, « la crise du coronavirus n'a rien à voir » avec cette situation de pénurie. D'après lui, l'origine de cette crise se trouve du côté de « la Chine [qui] veut faire pression sur l'Europe en bloquant le marché ».
Les professionnels se mobilisent
« Le secteur industriel des agroéquipements est déjà l’un des moins rentables de l’industrie française avec un taux de résultat net de 2 % contre 6 % pour l’ensemble de l’industrie manufacturière », alerte par ailleurs Frédéric Martin, président d’Axema. « Cette situation est extrêmement préjudiciable pour l’activité d’un secteur qui a un rôle clé à jouer tant pour la relance industrielle que pour la transition agroécologique, qui sont deux thèmes majeurs de France Relance », ajoute-t-il.
Axema et l’ensemble des industriels de la mécanique appellent aujourd'hui le Gouvernement à agir afin de rétablir les conditions de marché des matières premières industrielles et en particulier à revenir sur le dispositif européen de limitation des importations d’acier qui bloque toute capacité de sortie de crise. En parallèle, les professionnels demandent la mise en place d’une politique à moyen et long terme pour les agroéquipements permettant de s'adapter au nouveau contexte de transition agroécologique.